RÉFLEXION - L'Europe parviendra-t-elle à sauver son unité ?
Cette question, le monde entier se la pose tout autant,
sinon plus, que les peuples européens eux-mêmes car de la réponse qui lui sera
apportée par l'Histoire découleront bien des évènements décisifs pour
l'humanité. Il suffit pour s'en convaincre de considérer les conséquences
qu'eurent dans le passé la colonisation des peuples du sud, les deux guerres
mondiales qui mirent le feu à la planète tout entière, la construction du Marché
commun dans les années soixante du vingtième siècle.
Il se peut que l'accord intervenu à Bruxelles en fin de semaine dernière
colmate les brèches provoquées au sein de l'Union européenne par la crise
économique et financière qui menace l'existence même de l'Europe. Et dans ce
cas, même si l'Angleterre s'est crue obligée de prendre une fois de plus le
large, l'Europe retrouvera ses marques, mettra enfin de l'ordre dans ses
affaires intérieures, se dotera d'une autorité politique capable d'imposer à ses
États membres le minimum de cohésion sans lequel elle ne saurait exister. Bref,
même si les dégâts au sein de la communauté sont importants, le Vieux continent
se remettra en marche cahin-caha, dut-il pour cela s'amputer de quelques nations
trop dissipées pour accepter réellement la loi commune.
Mais il se peut aussi que la défection de l'Angleterre et plus encore les
contradictions qui sont apparues tout au long des débats de Bruxelles laissent
des traces profondes dans l'édifice européen, qu'elles lézardent inexorablement
cette construction en apparence solide mais dont les fondations sont
manifestement trop faibles pour supporter un ébranlement durable. Tout
simplement parce qu'il existe en réalité trois Europe au sein de l'Union :
l'Europe du nord, économe, vertueuse, un rien avaricieuse, peu portée sur le
désordre ; l'Europe du sud exubérante, inconsciente de ses responsabilités,
volontiers paresseuse ; et entre les deux un couple franco-allemand qui n'est
pas vraiment soudé mais qui tente de conjurer les démons du passé en resserrant
sans cesse les coudes.
Loin de nous l'idée que les jeux sont faits et que l'Histoire se trouve
écrite par avance. Anticiper le fait que l'un ou l'autre schéma l'emportera à
court terme refondant l'unité de l'Europe sur des bases solides ou, au
contraire, provoquant son implosion reviendrait à formuler un pari sur l'avenir
qui ne serait guère raisonnable.
Mais les peuples étrangers qui observent avec inquiétude l'évolution du vieux
continent se doivent, eux, de se préparer aux deux scénarios car leur
comportement devra à l'évidence être très différent selon que l'Union européenne
surmontera ses difficultés présentes ou, au contraire, s'enfoncera dans la crise
sans parvenir à résoudre ses contradictions. Pour l'Afrique, dont le premier
partenaire commercial et financier demeure l'Europe, une telle analyse s'impose
aujourd'hui comme un impératif catégorique.
La chose est assez nette, assez évidente pour ne pas mériter de plus amples
développements. Mais ceci étant dit, il convient tout aussitôt d'ajouter que
l'Union africaine ne semble guère armée pour mener une telle réflexion. La preuve en est l'incapacité où elle s'est trouvée récemment de faire
entendre sa voix dans les crises qui secouaient - et secouent toujours - la
partie nord du continent.
Les Africains comprendront-ils à temps que le temps perdu ne se rattrape pas
et qu'il leur faut bouger rapidement sur ce nouveau front avant que les jeux
européens soient faits dans un sens ou dans l'autre ?
Par Jrang An@go.
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